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24 avril 2006

Tous cons cernés !

George Brassens nous l’a bien chanté de sa voix grave, avec sa guitare en bandouillère et ses grosses moustaches légendaires. « Le temps ne change rien à l’affai-aire : Quand on est con, on est con ». Certes ! On veut bien le croire, on l’a constaté mille fois. Mais, au fait, qu’est-ce qu’un con, au juste ? Les cons, vaste programme, et sujet d’actualité plus que jamais, qui mérite bien un article sur Oulala. Que dis-je, un livre, une encyclopédie, toute une bibliothèque. Les cons constellent notre environnement, et vous en croiserez plus d’un sur vos diverses trajectoires, je vous le prédis.

Comme nous l’indique Pierre Desproges, cet expert ès-cons, « le mot "con" appartient à la langue française et à elle seule. Aucune langue étrangère ne peut se flatter de posséder un mot tout à fait équivalent au mot "con" ». Ce qui est à souligner, c’est que « con » est un terme générique assez mal défini et qui est difficile à expliquer mais que, quand on l’emploie à l’égard d’un individu qui mérite cet outrage, c’est le qualificatif qui lui va indiscutablement le mieux. Un peu comme la beauté, dont le chirurgien brésilien Ivo Pitanguy nous dit qu’elle est difficile à décrire mais que, quand on la rencontre, elle nous saute à la gueule. Les cons, c’est pareil ! Y’a pas à se gourer. C’est bien ce qu’exprime Michel Audiard quand il dit que « Un con, ça ne se définit pas, il faut donner des exemples ». L’éventail est assez large. Ça va du préposé derrière son guichet, membre recruté sur concours de l’administration, et donc confirmé dans sa position dictatoriale d’emmerdeur désagréable et incompétent, au président américain George Bush, qui recueille tous les suffrages au chapitre de la connerie, à défaut d’avoir recueilli suffisamment de vrais suffrages d’électeurs pour mériter son mandat.

Il y a des endroits où l’on a un maximum de chances de rencontrer des cons. Au stade, ils crient « allez les verts », grimés de toutes les couleurs de leur drapeau national et jouant de la trompette avec plein de fausses notes. Après ils cassent les vitrines en ville, devenant des cons dangereux, et ivres. Derrière un volant, écrasant rageusement la pédale de leur bolide, doublant sur une ligne jaune, en attendant qu’un jour ils se retrouvent cons invalides ou cons meurtriers. À Lourdes où d’autres, pas cons eux par contre, leur fourguent de l’eau bénite et des statuettes en plastique vendus à prix d’or. Les cons sont souvent en uniforme, surtout militaire, avec des médailles qui pendouillent, signe irréfutable de leur appartenance à la congrégation, sujet de cet article. Rien n’est plus dangereux qu’un con qui a une parcelle d’autorité. Il y a des cons qui sont juges, flics ou inspecteurs des impôts. Quand on a le malheur de tomber sur un de ceux-là, gare... Les cons nous énervent. Le pire c’est quand on les voit disserter sur un plateau de télé.

Le mot con est souvent employé seul, mais il s’orne volontiers d’adjectifs qui lui donnent alors une saveur particulière : Un petit con, un gros con, un jeune con, un vieux con, un vrai con, un con dangereux, un grand con, un sale con, un pauvre con. On peut être con comme un balai, avoir l’air con, être pas con, être une tête de con, ou encore être con sur les bords. Michel Audiard (encore lui) écrivait que « Les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît », ajoutant que « J’parle pas aux cons, ça les instruit ». Et Frédéric Dard, un autre observateur admirable de la nature humaine écrivait « Je ne souhaite pas la mort des cons : j’aime trop mes semblables », déplorait qu’ « À notre époque les vieux cons sont de plus en plus jeunes », et affirmait que « Traiter son prochain de con n’est pas un outrage, mais un diagnostic ». Les cons sont souvent fanatiques et en bande, mais on en trouve aussi de remarquables exemplaires individuels. Ils ratissent un peu partout, et n’ont pas toujours l’air agressif ou antipathique. Ils peuvent avoir une bonne tête et être pétris de louables intentions, comme le con du "dîner de cons". Et ce n’est pas parce qu’ils sont un brin sympathiques qu’ils en sont moins cons, hélas ! Les moins cons d’entre-nous se moquent souvent des plus cons. Car la connerie n’est pas une dichotomie. La connerie s’échelonne du zéro à l’infini, en passant par toutes les étapes intermédiaires. Ceci dit, quand quelqu’un est qualifié de "con" plus souvent qu’à son tour, c’est qu’il a franchi les limites du raisonnable et que son cas est suffisamment sérieux et chronique pour mériter le label.

Le con est définitivement irrécupérable, et son décalage par rapport aux autres est irréversible. N’essayez même pas, c’est voué à l’échec. Je dis ça parce que j’ai essayé trop souvent et j’ai été à chaque fois déçu. Y’a rien à faire. Contrairement à ceux qui peuvent être tant bien que mal éduqués, comme les idiots, les imbéciles, les enfoirés, soignés comme les malades de la folie, ou encore convaincus, et dont l’avis ou l’opinion peuvent être rapprochés des nôtres (sous-entendu : nous, les pas cons, bien sûr), le con conservera immuablement sa position du début, sans changer le cap d’un iota. Car le con, messieurs-dames, est impératif, péremptoire, et sûr de lui. Le con sait, et affirme sans douter. Le doute ne fait pas partie de son vocabulaire, et comme le dit encore Audiard, il ose tout, même les trucs les plus cons. C’est normal, il est con. Il ordonne à tous d’être de son avis. Faute de quoi, il les traite de cons. Le con, évidemment, ne se rend pas compte qu’il est con. Autrement il cesserait immédiatement de l’être ou, au moins, essaierait. Le con est le produit collectif de son environnement social ou familial, car je doute qu’on naisse con, bien que certains aient d’indéniables dispositions naturelles. Les cons sont nombreux. Ils sont, partout, en surnombre. Si on essayait de les éliminer physiquement, ce serait le plus grand génocide de l’histoire humaine. Ils sont tellement nombreux qu’ils définissent, selon Bouvard, la démocratie : « La majorité c’est cinquante pour cent de cons, plus un ». Sartre prétendait que l’enfer c’est les autres. C’est surtout les cons.

Pour finir ce triste constat sur les cons qui nous cernent, force m’est de reconnaître qu’on est toujours le con de quelqu’un. Reste à savoir de qui ? D’un con, sûrement.

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Commentaires
B
J'ai lu avec intérêt ta prose sur le Con. Un vaste débat. Mais je pense l'avoir cerné en quelques lignes et après 59 ans d'expérience personnelles et collectives. J'ajouterai que le con pathologique manque singulièrement d'humour et d'auto dérision..
F
Bonjour Tendre Poison,<br /> <br /> Ça c'est un sacré coup de gueule. Tout y est et les références ajoutent ce petit rien qui convaincrait même un... con. <br /> Bravo pour cet article fouillé, bien écrit, bourré d'humour (ben oui) malgré le sérieux du sujet.<br /> Heureusement pour nous qui ne sommes pas des cons, bien que cernés par eux (une foule innombrable et indénombrable), nous avons su nous retrouver en comité restreint mais au moins avons-nous la chance de nous apprécier. Le reste, c'est CON... sternant.<br /> <br /> Bonne fin de journée et excellent Noël (si tu fais la fête).<br /> <br /> Amicalement Fred
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